在最後一段,拉斯˙馮˙提爾說得很有趣:「有人跟我說:『千萬別犯那些老(男)導演所犯的錯:他們找愈來愈年輕的女演員來演戲,而且她們穿得愈來愈少。』我就這樣回答他們:『謝謝你們的建議;其實,這正是我準備要做的事,我的女演員們將會非常年輕也會穿得非常得少!』其實,要控制我自己,根本不是難事;你們跟我說什麼,我就會故意做相反的事!」


En livrant son mode d'emploi, le cinéaste Lars von Trier dit tout et son contraire
Le Monde | 09.08.11 | 16h13 • Mis à jour le 09.08.11 | 18h10

Hvidovre (Danemark), envoyé spécial – Pour aller d'un bâtiment à l'autre, sur le campus de Zentropa, à Hvidovre, dans la banlieue de Copenhague, Lars von Trier se déplace en chariot électrique, comme un vieil Américain sur un parcours de golf. Que ce soit parce que les hangars de brique et de béton sont ceux d'un ancien camp militaire ou parce qu'il serait dommage de laisser passer l'occasion d'une petite provocation, le golf cart du réalisateur de Melancholia est peint couleur camouflage.

Sur le chemin qui va du réfectoire spartiate à son bureau, Lars von Trier est intarissable sur deux sujets : Proust et la sexualité féminine. Il découvre la Recherche et passe le reste de son temps à écouter des femmes raconter leur vie sexuelle. Le produit de cette recherche constituera la matière de son prochain film, Nymphomaniacs, le "film porno" dont il avait annoncé la mise en chantier à Cannes, le 18 mai, lors d'une conférence de presse qui lui valut d'être déclaré persona non grata par le Festival (Le Monde des 20 et 21 mai). Au terme d'une longue conversation, pleine de digressions, on peut reconstituer quelques réponses, en se pliant à cette requête du cinéaste, dont, après des jours de réflexion, il reste impossible de savoir si elle est -naïve ou retorse : "Je compte sur vous pour juger si j'ai dit des bêtises."

Or, Lars von Trier a tendance à dire tout et son contraire, qu'il s'agisse de la différence entre les sexes qu'il nie avant d'expliquer comment il l'exploite dans la direction d'acteurs, de la judaïté qu'il revendique avant de revenir sur sa fascination pour l'esthétique nazie, ou des vertus des règles artistiques qu'il s'apprête à bafouer dans son prochain film.

Une fois juxtaposés les termes de ces contradictions, voici quelques nouvelles de Lars von Trier. Nymphomaniacs "sera un foutoir. Des styles différents, des choses idiotes, des histoires qui n'ont rien à voir avec l'intrigue. En ce moment, je lis des romans dans lesquels l'intrigue ne fait qu'affleurer de temps en temps, alors que les films de nos jours... il n'y a que l'intrigue qui compte. Je voudrais faire un film long avec de la pornographie et de la philosophie. Ce sera encore plus long (que La Maman et la Putain, qu'il a revu récemment), les gens dormiraient, ils apporteraient leur sac de couchage. Comme notre société est en pleine crise financière, c'est un peu chercher les ennuis." Et si ces ennuis-là ne suffisent pas, il a l'intention de ne pas éluder la sexualité enfantine de ses personnages féminins ; il a l'air ravi quand on lui fait remarquer qu'il va droit vers la polémique.

"Forcer sur un ingrédient"

Ce désir de chaos est aussi une réaction à l'admiration quasi unanime qu'a suscitée Melancholia. Lars von Trier a décidé de représenter l'opposition à cette adulation. "J'ai pris beaucoup de plaisir à le faire, je me suis laissé emporter un peu par le fait de me sentir bien en faisant le film. C'est comme quand on fait de la cuisine, on a envie de forcer sur un ingrédient parce qu'il a bon goût. C'était merveilleux de s'amuser avec ces idées et ces images romantiques, mais ce n'était peut-être pas très honorable. Le film est exactement ce que je voulais qu'il soit, mais j'en suis très loin."

Né de la longue dépression qu'a traversée le cinéaste, Melancholia a aussi été inspiré par Penélope Cruz à qui le rôle principal était initialement destiné. Finalement, l'actrice espagnole n'a pu s'engager aux dates désirées. Kirsten Dunst, la mariée dépressive et Charlotte Gainsbourg, la soeur psycho-rigide, ont pris sa place. "Les deux rôles féminins représentent mes deux moitiés", explique Lars von Trier.

Quand on lui fait remarquer qu'il semble s'être désintéressé des hommes dans ses derniers films, il révèle : "Parfois, je reçois des lettres de femmes qui me disent : "Comment pouvez-vous nous comprendre ?" Je dois leur expliquer que c'est une arnaque. J'écris des films qui parlent de moi, les personnages féminins sont des clichés, nuls. Juste avant de faire le film, j'échange les sexes des personnages, c'est un truc." Juste avant de convenir qu'il préfère de loin diriger des actrices parce que les acteurs "entrent en compétition" avec le réalisateur, que les hommes veulent "tout contrôler et qu'un acteur ne contrôle rien".

Sans cesse, la conversation revient sur l'incident cannois, sa façon à lui de gâcher la fête comme le fait le personnage de Kirsten Dunst qui fait l'amour avec l'un des invités de son mariage. Cette comparaison lui paraît imparfaite : "Elle savait ce qu'elle faisait, pas moi." Il se défend comme un enfant victime de grandes personnes. "J'avais l'impression d'être sur une moto qui entre trop vite dans un virage, et je voyais les sourires des journalistes qui se dessinaient dans l'obscurité."

"Pour clarifier les choses"

Quant aux réactions qu'ont suscitées ses propos, il invoque un documentaire israélien, Defamation, de Yoav Shamir, qui traite de l'antisémitisme contemporain à travers l'action de l'Anti Defamation League américaine. "Je voyais ce bureau dans lequel ils attendent qu'on leur signale des cas d'antisémitisme. Ils avaient recensé cinq incidents en un mois, le réalisateur essayait d'enquêter, mais ils n'avaient rien à faire. La réaction à cette chose à Cannes est arrivée exactement à l'heure où on se réveille à New York et je les imaginais se disant : "Enfin nous avons quelque chose !""

L'instant d'après, il revient sur sa généalogie compliquée : "L'homme dont j'ai longtemps cru être le fils était juif. C'est ma culture, je suis aussi juif que n'importe qui. J'ai rajouté le "von" à son nom, Trier, quand j'ai appris que les juifs ne pouvaient être anoblis. C'était ma manière de lutter contre la discrimination. Quand j'ai appris que mon père était allemand, pour clarifier les choses dans ma tête, je trouvais drôle de dire qu'au début je croyais être juif et que j'ai découvert que j'étais nazi. En voulant dire qu'il était allemand, que je venais d'une famille allemande. Tous les gens qui me connaissent comprennent."

Enfin, le cinéaste donne le mode d'emploi de Lars von Trier : "Quelqu'un m'a dit : "Ne faites pas l'erreur de tous les vieux réalisateurs : dans leurs films, les femmes sont de plus en plus jeunes et de moins en moins habillées." Et j'ai répondu : "Merci beaucoup, c'est exactement ce que je vais faire, elles vont être très jeunes et très déshabillées !" C'est très facile de me contrôler, dites quelque chose et je ferai le contraire."
Thomas Sotinel
Article paru dans l'édition du 10.08.11

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