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法國《世界報》(Le Monde)晚報給《阿黛兒的人生:第一章跟第二章》滿分四顆星。

"La Vie d'Adèle" : deux femmes s'aiment, corps et âme
LE MONDE | 08.10.2013 à 10h37 • Mis à jour le 10.10.2013 à 13h34 |

La voici donc enfin cette Palme d'or décernée le 26 mai à l'unanimité du jury présidé par Steven Spielberg après cinq minutes à peine de délibération. Que l'attente fut longue, émaillée d'interviews, de polémiques et autres déclarations fracassantes ! La voici donc, cette Vie d'Adèle - Chapitres 1 et 2. Qu'on se rassure : ce joyau cinématogra-phique n'a rien perdu de son éclat cannois.
Par où commencer ? Peut-être, tout simple-ment, par Adèle (Adèle Exarchopoulos), ou plus exactement par son regard, son sourire lumineux. Sa bouche, ses lèvres, ses incisives. Chez Kechiche – on oubliait, ce film magnifique, adapté de la bande dessinée Le Bleu est une couleur chaude, de Julie Maroh (Glénat, 2010), est signé Abdellatif Kechiche –, tout procède du visage. Ici, la bouche de l'héroïne renvoie immanquablement à celle de sa partenaire, Emma (Léa Seydoux). Plus dure, moins adolescente. Champ contre champ, bouche contre bouche.

LES CORPS, LES PEAUX, TEL UN TABLEAU

Impossible ensuite de ne pas évoquer la science du cadre et de la lumière de Kechiche (et de son directeur de la photographie, Sofian El Fani). Une virtuosité incomparable pour filmer les visages, et donc les émotions ; mais aussi les corps, les peaux, à la manière d'un tableau ou d'une sculpture – on y reviendra. Multiplicité des axes, deux caméras parfois pour une même séquence, gros plans saisissants, toute la palette de ce que le cinéma peut offrir comme manières de cerner l'âme humaine est ici utilisée.
Et comme si cela ne suffisait pas, comme s'il fallait approfondir encore ce que l'image suggère, un montage sublime de fluidité parfait la démonstration. La Vie d'Adèle est un merveilleux moment de cinéma. Il faut maintenant aller plus loin et revenir aux personnages. Adèle, une jeune et jolie lycéenne lilloise ; apparemment bien dans sa peau ; dont la vie bascule le jour où, dans la rue, elle croise le regard d'Emma, une jeune femme aux cheveux bleus. L'amour et le hasard.

"C'EST TROP BIEN, MARIVAUX"

Comme souvent dans les films de Kechiche, tout commence avec la littérature. En classe, Adèle étudie La Vie de Marianne – "Il faut que la terre soit un séjour bien étranger pour la vertu, car elle ne fait qu'y souffrir." Rapprochant un passage de ce roman inachevé de Marivaux d'un extrait de La Princesse de Clèves, le professeur interroge les élèves sur la notion de coup de foudre et sur l'impression de prédestination que l'on ressent parfois lorsque l'on rencontre quelqu'un.
"C'est trop bien, Marivaux", dit Adèle. De la littérature à la vie, il n'y a qu'un pas. Un peu plus tard, après une expérience ratée avec un garçon de son lycée, voici Adèle à nouveau en classe. Antigone, cette fois. Le jour où elle va dire non, le jour où elle va mourir. Une tragédie, explique la professeure, une tragédie qui touche à l'intemporel, à l'essence même de l'être humain. Premiers baisers à une copine de classe dont les ongles des mains sont vernis en bleu. Premières larmes – il y en aura beaucoup, souvent mélangées à de la morve.

NAISSANCE DU DÉSIR

Et puis enfin, un soir, voilà Adèle qui pénètre dans un bar gay ; cherche Emma ; croise Emma ; finit par lui parler. Adèle troublée. Coup de foudre. Naissance de l'amour ; naissance du désir.
Le lendemain, Emma viendra la chercher à la sortie du lycée sous le regard ébahi des copines. Pas facile à 15 ans de faire accepter son homosexualité. Alors on nie. Contre toute évidence, au risque de l'incompréhension et de la violence. Adèle et Emma iront ensuite s'asseoir sur un banc, sous un bel arbre. Emma en 4e année aux Beaux-Arts ; elle peint, elle va exposer. Visiblement très cultivée. Au programme de cette première discussion, Sartre et l'existentialisme, Sartre et Bob Marley...
Premier baiser. Retour à la petite maison de brique rouge des parents d'Adèle. Elle, habillée de bleu, dans sa chambre. Magnifique plan à la Vermeer. Visite du Musée d'art et d'industrie. Déjeuner sur l'herbe. La peinture, toujours. L'art et la vie.

SEUL OSHIMA A OSÉ QUELQUE CHOSE DE SEMBLABLE

Entre-temps, il y aura eu cette première fois où Adèle et Emma firent l'amour. Immense scène de sexe ensevelie sous les râles et les soupirs. Plaisir charnel, plaisirs des sens; chorégraphie des corps, jouissances. Peinture toujours, on pense à Manet. Seul Oshima, dans L'Empire des sens, a osé quelque chose de semblable.
Petit à petit se dessine le projet de Kechiche. Filmer, peindre, sculpter, comme on voudra, le portrait d'une jeune fille. La regarder grandir, se débattre avec la vie, se perdre, se retrouver.
Emma est artiste, tout entière absorbée par son travail ; Adèle, elle, souhaite devenir institutrice. Transmettre. Une artiste intello, une apprentie instit : deux vocations, deux origines sociales différentes. C'est leur différence sociale qui génère une différence d'aspiration personnelle.

SEPTICÉMIE D'UN COUPLE

Subrepticement, une forme de lutte des classes s'insinue à l'intérieur même de cette histoire d'amour. Empoisonnement du sentiment amoureux, septicémie d'un couple, d'autant plus violente qu'Adèle hésite entre homo et hétérosexualité. Rupture, vide, deuil, solitude. Adèle est héroïque, explique Kechiche, en ce qu'elle encaisse tout ce qui lui arrive et continue à accomplir ce à quoi elle était destinée.
On pourrait, il faudra des heures pour parler de ce film une fois qu'il aura été vu. Le replacer dans l'œuvre de Kechiche, pas loin en définitive de L'Esquive. Convoquer Pialat, Bonnaire et A nos amours. Evoquer Bresson. Mais pour l'heure, terminons par un immense bravo à tous les acteurs, premiers et seconds rôles réunis, tous ahurissants de vérité et d'humanité.
Avec, bien sûr, une mention spéciale à Adèle Exarchopoulos qui, au côté d'une Léa Seydoux impériale, réussit la prouesse à la fois d'être l'héroïne de Kechiche et d'incarner ce que disait Marivaux dans La Vie de Marianne : "A ceux qui n'ont ni rang ni richesse qui en imposent, il leur reste une âme, et c'est beaucoup."
Les choix du Monde

EXCELLENT

 
Par Franck Nouchi

薯條

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